En septembre 2015, j’allais à la rencontre de cinq graphistes indépendants et de deux collectifs engagés français, en organisant une table-ronde au Lieu-Dit, bar-restaurant emblématique du 20e arrondissement de Paris. Mon objectif : les questionner sur leur conception « du graphisme engagé », terminologie qui s’est avérée être critiquée et critiquable lors de l’événement. C’est à la suite de ma rencontre avec Anne Desrivières, Guillaume Lanneau, Stéphane Dupont, Dugudus, Sébastien Marchal, Formes Vives, Adrien et Geoffroy, Ne Rougissez Pas et Julia Chantel que l’idée d'une exposition qui présenterait leur travail pour la première fois au Québec, est née.
Pendant ce temps-là en France démontre la force du graphisme lorsque ses praticiens se mettent en tête d’être avant tout des citoyens, d’agir dans la rue, pour la rue, avec les gens, pour les gens. L’héritage historique dont ils disposent et son influence sur leur travail est indéniable et parfois si fort qu’il est peut-être difficile à endosser, à dépasser ou à surmonter. Néanmoins, les processus actuels leurs sont propres et leurs interventions diverses. Chacun démontre une personnalité affirmée, une capacité à faire sa place et à redonner sens à une pratique du graphisme qui donne une voix différente à la rue, aux quartiers et surtout à ceux qui les habitent. Quant à la question économique, les avis divergent. Du projet autofinancé, gage d’une liberté plus grande, à la commande ou à l’appel d’offre publics, chacun fait comme bon lui semble, là n’est pas la question. Au contraire, celle à se poser concerne la place que leurs pratiques joueront à long terme sur le tissage du social, dans la fabrication de la ville, dans l’appréhension et le partage des choses du quotidien.
Pendant ce temps-là en France affirme haut et fort le rôle du graphisme et de ses praticiens pour l’innovation sociale et politique. Souhaitons que de ce côté-ci de l’Atlantique, ils inspirent nos graphistes actuels et futurs à s’engager ouvertement sur cette voix en la revendiquant au sein de leurs pratiques quotidiennes. Conséquemment, c’est aux commanditaires et aux décideurs issus d’institutions diverses, d’organismes ou de nos mairies que je lance un appel à soutenir et à promouvoir ce type d’interventions pour enrichir et transformer leur manière de faire, d’agir et d’interagir avec leurs publics et leurs citoyens.
Valérie Yobé.
Commissaire, graphiste, professeure, chercheuse et tutti quanti.
Les autres membres de la tribu : : Alexe Houtart, Isabelle Plamondon, Jean-Michel Quirion (étudiants à la maitrise en Pratiques des arts et muséologie de l'École multidisciplinaire de l'image de l'Université du Québec en Outaouais) et Marie-Hélène Leblanc, directrice de la Galerie UQO